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Ding-Dong

Vernissage
me 21.05 2025
Salle Saint-Ours
18:00
Exposition
je 22.05  – sa 05.07 2025
Salle Saint-Ours
MA-VE
15:00-19:00
SA
14:00-18:00
MAYOTTE DE SAULIEU
CURATRICE DE L'EXPOSITION
Entrée libre
Soirée de performances
ve 06.06 2025
Salle Saint-Ours
18:30
Entrée libre
Rencontre avec la curatrice
me 25.06 2025
Salle Saint-Ours
19:00
Entrée libre

L’exposition ding-dong dénoue et renoue les espaces domestiques : œuvres déguisées en meubles et espaces d’accrochage en maison, familiarités se détournent et distances s’entretiennent.
Ainsi, l’exposition explore les rapports entre relations familiales, domesticité, appartenances et environnement : au-delà des passés individuels de chaque œuvre, ding-dong s’en fait leur foyer, dans ses considérations culturelles et sociales.
Comment nos habitats reflètent-ils nos valeurs, nos croyances et nos identités ? Comment façonnent-ils nos interactions avec le monde qui nous entoure ?
À travers ces questions, l’exposition nous incite à réfléchir à la manière dont notre environnement physique établit nos paysages émotionnels et psychologiques.
En nuances troublantes et mystères cérémonieux, s’admettent rituels banals du quotidien aux origines incertaines et aux fins incalculées.

Mayotte de Saulieu et Giulia Paulus


Nous sommes le 21 mai 2025. Je fais un discours sur une petite estrade, devant une salle comble,  pour l’ouverture de l’exposition ding-dong dont je suis la commissaire. Cette exposition est le fruit d’une résidence curatoriale de la Société des Arts. 

*Je me racle la gorge*

*J’ai l’air assurée, le dos droit, mon sourire affiche une dentition parfaite*

*Je suis fière !*

*Je toise la salle*

Hm hm …

Bonjour ! Bonjour à tous·te·xs. J’espère que vous allez bien ?

*Le public m’acclame. Je suis charismatique, j’adore ça.*

*Je tape avec une fourchette sur mon verre pour avoir toute l’attention sur moi*

Je voudrais faire un discours de remerciement pour les artiste·x·s et pour toutes les personnes qui ont travaillé sur cette magnifique exposition. Ding-dong !

*Je cite tous les noms des artistes*

Elie Autin
Djellza Azemi
Melissa Biondo
Pauline Coquart
Emi Curty
Hugo Langlade
Agathe de Limoges
Daggo Djibrine
Julien Fournival
Alexandra Galian
Leonardo Idalécio
Club Lab
Hugo Langlade
Ettore Meschi
Erika Nieva Cunha
Jovien Panné
Zeltia Robin

[…] Et moi même ! Bravo. A votre santé ! Et à la mienne, évidemment !

*Gling!!!!* *Ding-dong!!!*

A la une, à la deux, à la trois …

*Je me jette dans le public qui me rattrape à 1000 mains et me transporte jusqu’à la salle d’exposition*

[…]

Je suis une artiste déguisée en curatrice. Une curatrice qui rêve de faire de l’art. Une artiste ratée qui est devenue curatrice.

C’est plus facile de montrer l’art des autres plutôt que de s’exposer soi-même. Quand tu deviens commissaire, tout le monde oublie que tu as été artiste un jour. Et si l’exposition est mauvaise, je ne serai pas à blâmer, il faut séparer la curatrice de l’artiste.

*Je me racle la gorge*

Nous exposons ensemble. Je repense à ce que Sarah, une ex étudiante en art visuel, me dit un matin : « nous sommes les professionnelles de notre propre travail ». Mon travail aujourd’hui, c’est de montrer le travail des artistes qui m’inspirent.

*Silence*

En somme, je suis une artiste et/ou curatrice, tout ce qu’il y a de plus normal. Je suis une artiste et/ou curatrice et je me suis vue dire « Je voudrais changer les choses ». Je me suis bien fait rire. C’est plus cool de dire qu’on veut « changer les choses » plutôt que de dire « je suis confortable là où je suis. »

Quand je parle de « changer les choses » , je ne sais même pas moi-même ce que cela veut dire.

Peut être faire comme Lee Losano et quitter l’institution. Leur faire un gros fuck par devant. Arrêter de faire semblant de ne pas être seule. Faire des choses ensemble. Arrêter de se regarder les uns les unes les autres pendant les vernissages. Hurler pour parler de son art et celui des autres.

Je dis « je voudrais changer les choses », mais je suis là, à faire la commissaire dans un palais.

Malgré tout, j’ai quand même fait l’effort de m’habiller dans un parfait combo des deux : un peu chic, un peu choc : je porte des cerises aux oreilles, un collant blanc, des talons chics, et un t-shirt à slogan provocateur. « Oh when will I be famous, when will it happen ». Je suis, je veux, j’ai l’air désinvolte. Comme Alexandria Ocasio-Cortez avec sa robe « tax the rich » au MET Gala 2021, je pense être la louve dans la bergerie. En réalité, je suis une chienne bien apprivoisée. Je me rassure en me disant que c’est une chienne qui a élevé Rome, que c’est une chienne qui a voulu tuer Andy Warhol.

Je pense souvent à Olivier Marboeuf qui dit qu’on passe la plupart de notre temps dans des lieux autogérés, des « off space », mais qu’au final on lèche tous·te·x les institutions.

Je suis une curatrice/artiste comme tout le monde, et j’envoie des dossiers de projet à qui veut bien les recevoir : ma radicalité s’arrête ou commence celle des autres.

J’adore cracher dans la soupe que je gobe après : j’ai envie de dire à voix haute que je suis une grosse rageuse et de dire que je déteste l’art. Je suis une grosse rageuse, mais j’aime sincèrement l’art et les artistes qui m’entourent et qui m’inspirent. J’aime sincèrement le projet que j’ai fait, et surtout les artistes qui y exposent.

En plus de ces artistes, je suis bien entourée.
Jack Albertham dit : « l’échec aime la réussite, le raté est une occasion collective ».

Agathe nous parle de « s’organiser ensemble », Sabrina me dit « tu devrais faire ton propre solo show », Melissa me dit « tous les coups sont permis », Elise me dit « il n’y pas de hiérarchie, nous sommes tous·te·x·s pareil·le·x·s », Sonia me dit « fais ce que tu veux », moi je dis « je voudrais changer les choses ».

Mon propre solo show fin de résidence, ça serait une expo avec des personnes qui m’ont accompagné à être qui je suis maintenant tout de suite.

Ça serait un vrai vernissage avec de la vraie bouffe sans gluten & sans lactose, des vraies artistes, des vraies œuvres, et un vrai public.

Un vernissage où personne n’a à se justifier,
où on est tous·te·x·s ensemble dans la même merde.

Attendre ici la fin, Entre deux coupes de champagne, Mais rien n’a de sens, Entre deux petits fours, je cherche une âme qui pourra m’aider, peut-être une institution ?  


Mayotte de Saulieu

Mayotte de Saulieu, curatrice de l’exposition, est également artiste, programmatrice et DJ – sous l’alias Maya Fortune. Née en 1999 à Draguignan (FR), diplômée de la HEAD, elle vit et travaille à Genève (CH).

À travers la notion d’échec et de son récit, Mayotte tente de décrire une agentivité amoindrie par une productivité capitaliste, de manière ludique et impertinente. Pour autant, ses œuvres, axées autour de l’installation, de la performance et de l’écriture, présentent un pan vulnérable de l’expérience de l’insuccès, notamment via un humour premier degré, littéral, amenant une compréhension simple et directe. Elle fait partie de plusieurs collectifs : Sainte Claude (FR, CH, BE), qui réfléchit et organise de nouveaux espaces de fêtes ; à Duplex (CH), équipe rattachée à l’espace culturel autogéré du même nom à Genève ainsi que de Gofildren (FR), festival promouvant les scènes artistiques émergentes musicales, performatives et visuelles.

 


La production des œuvres de l’exposition bénéficie du soutien de